Sam. Juil 27th, 2024

Par Alexandre Leclerc 

CRITIQUE/Vous êtes du genre à monter votre sapin de Noël une fois l’Halloween terminée? Mariah Carey joue dans vos oreilles dès le 1er novembre? Les algorithmes de Netflix vous harcellent (avec raison) avec leurs nouvelles productions cinématographiques aux titres réinventant année après année les jeux de mots à faire avec «Christmas»? C’est donc dire que 23 décembre, nouveau film de Miryam Bouchard (Mon cirque à moi, Lignes de fuite) scénarisé par India Desjardins (autrice des «Aurélie Laflamme»), est fait pour vous.  

Ce récit choral, frère spirituel de Love, Actually, assume pleinement son côté quétaine, pour le plus grand plaisir d’un public en quête de nouvelles options québécoises du temps des Fêtes. 

Une multitude de personnages et de trames narratives 

Le film nous plonge au cœur de la frénésie du 23 décembre. Une tempête s’apprête à s’abattre sur le Québec. Elsa (Virginie Fortin) est une autrice de romans jeunesse qui n’a jamais réussi à trouver l’amour. Elle attend la visite d’un ami de longue date (Sacha Charles), qui doit arriver de Londres sous peu. Pendant ce temps, sa sœur (Catherine Brunet) et son amoureux (François Arnaud) comptent les jours avant la naissance de leur premier enfant. Est-ce que cette arrivée prochaine mettra un terme à leur précieuse liberté une fois pour toutes ?  

La mère d’Elsa (Guylaine Tremblay) travaille quant à elle très fort aux fourneaux pour offrir un réveillon digne de ce nom à ses enfants aux exigences multiples. Une attaque cardiaque de Normand (Michel Barrette), son nouveau mari, viendra bouleverser le quotidien de tous et toutes. Ils se retrouveront au cœur de la ville de Québec, au mythique Château Frontenac, dans l’attente de nouvelles sur son état de santé. La directrice de l’hôtel (Bianca Gervais), bonne amie d’Elsa, doit de son côté s’assurer que la levée de fonds prévue ce soir-là se déroule sans heurts, alors qu’un chanteur populaire (Stéphane Rousseau) doit y livrer une prestation après plusieurs années de pause forcée. Entre tempête de neige, déceptions et espoirs, l’amour triomphera-t-il ? Bien sûr que oui ! 

Un film qui assume tous les codes du genre 

Dans une entrevue accordée à CFAK lors du passage de l’équipe du film à Sherbrooke, India Desjardins affirme avoir voulu livrer un film de Noël classique à saveur québécoise, sans compromis pour les clichés. « C’est certain qu’il y a un baiser à la fin, et non, le personnage de Michel Barrette ne meurt pas. On ne veut pas faire un film triste, on en veut un réconfortant ! » Mais, surtout, Desjardins et Bouchard constatent la criante absence d’offre cinématographique québécoise le temps des Fêtes venu. « J’avais envie de faire un film où on se reconnait au Québec. Il y a des tempêtes de neige, on doit aller visiter notre famille dispersée aux quatre coins de la province… Et on voulait surtout voir de la vraie neige à l’écran ! » Ce qui implique un tournage hivernal, évidemment plus complexe et couteux. 

Et c’est vrai que le Québec se fait assez timide en ce qui concerne les films de Noël. Année après année, on revisite par défaut La guerre des tuques et Nez rouge, à demi dépités, quoique somme toute réconfortés. On en connait les péripéties par cœur, mais on prend plaisir à s’y replonger tout de même. En ce sens, 23 décembre pourra assurément combler un manque, car son public attend depuis longtemps un film comme celui-ci. On y retrouve de la romance, de la comédie, des thématiques comme la famille et le lâcher-prise (ou plutôt le manque de celui-ci), le tout à saveur contemporaine.  

Certaines situations vont paraître improbables, et pourtant Desjardins nous affirme que la plupart des événements se sont véritablement produits lors d’un 23 décembre qui remonte à une dizaine d’années. « J’ai même dû en retirer quelques-unes, car j’étais certaine que le public ne pourrait pas les croire ! » C’est vrai que le tout est joué très gros ici. Toutefois, il en est ainsi dans la plupart des films de Noël américains, qu’on ne peut toutefois s’empêcher de revisionner chaque année. Une partie du plaisir vient du fait qu’on sait que peu importe les proportions que prendra le récit, tout va se dénouer de la meilleure façon possible. Il y a quelque chose de profondément réconfortant dans cette absence de surprise qui, certes, ne fait pas l’unanimité, mais qui permet de se détacher du vrai monde, le temps d’une heure et demie de fantaisie artificielle. 

Loin d’un film parfait 

Non, 23 décembre n’est pas le film de l’année. Et ce n’est pas son ambition non plus. Son objectif est plutôt de combler un vide flagrant de notre cinématographie nationale, et offrir une alternative aux amateurs de films de Noël qui n’ont d’autres choix que de consommer des produits américains génériques, peu ou pas adaptés à notre réalité typiquement québécoise. Oui, les personnages et les situations sont clichés. Oui, certaines trames narratives sont trop peu développées. Mais tous ces éléments sont compensés par l’aisance de Guylaine Tremblay et Michel Barrette, et par le fait que, pour l’une des rares fois, on sent l’argent à l’écran.  

La ville de Québec, sous-représentée au cinéma, y est agréablement mise en valeur, et sur le plan technique, le film est une réussite. Toute la distribution adhère à fond au projet et concentre ses efforts dans le but de nous livrer un Love, Actually bien à nous. Il est évident que les personnes qui peinent à s’investir dans un film de Noël (j’avoue être à l’occasion cette personne) pourront difficilement trouver leur compte ici. Mais ce film ne s’adresse pas à eux. Il interpelle plutôt les nostalgiques, les friands de comédies à l’eau de rose, ceux et celles qui visionnent un film plus pour se divertir et se vider la tête que pour une stimulation intellectuelle exigeante. Alors, est-ce que le film est voué à devenir un classique du temps des Fêtes ? Fort probablement, en attendant un plus vaste répertoire !  


Crédit image @Karine Dufour

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