La grande traversée d’Anabelle Guay

Par Béatrice Vigneault

Après presque deux ans de préparation acharnée, c’est le 18 juin qu’Anabelle Guay a finalement pris le départ pour son impressionnant périple. L’athlète se lance à travers le Québec pour une cinquantaine de jours. De Sherbrooke aux Îles-de-la-Madeleine, à vélo, en randonnée et en bateau à rames, la jeune femme de 23 ans souhaite transmettre un message clair : la diversité corporelle a sa place dans les sports de plein air.

Celle qui a grandi dans une famille de plein air, de gens qui adorent l’aventure, se considère comme une passionnée des sports depuis son plus jeune âge, et s’est rapidement aperçue qu’il n’y avait pas beaucoup de corps comme le sien sur les sentiers, en raquette ou à vélo. Elle a donc commencé à se questionner très tôt à savoir si elle avait réellement sa place dans le sport. La grande traversée est le moyen pour elle de se dépasser tout en portant un message clair : tous les corps ont le droit de pratiquer l’activité physique.

Diversité corporelle et sport de plein air

C’est depuis toujours qu’Anabelle Guay a un grand intérêt pour les films d’aventure où des athlètes se dépassent et réalisent des exploits grandioses, mais elle ne s’était jamais vue réaliser de tels défis. La raison est principalement l’absence de diversité corporelle dans ces films qui venait confirmer en elle ces sentiments d’exclusion et d’inaccessibilité. Dans les dernières années, le sentiment d’urgence d’agir est devenu de plus en plus important pour elle. C’est de là qu’est née la grande traversée. Le défi qu’elle se lance, c’est pour se dépasser, mais aussi pour mettre de l’avant l’inclusion dans les sports, pour parler de la diversité corporelle et pour permettre à plus d’adeptes du sport de sortir dans les sentiers peu importe qui ils sont. 

L’aventure d’Anabelle sera en grande partie filmée et tout son cheminement servira à créer du matériel pédagogique afin de sensibiliser les jeunes à la pluralité des corps dans l’activité physique. Le récit/documentaire de son aventure sera ainsi teinté du principe de neutralité corporelle. La neutralité corporelle se base sur ce que le corps peut accomplir, et non sur ce à quoi il ressemble. Elle souhaite se dépasser pour le plaisir et le bien-être. Elle souhaite sensibiliser, inspirer et outiller les jeunes à se surpasser et à développer une estime de soi positive.

Pour transmettre sa mission davantage, Anabelle donne des conférences dans les écoles et elle collabore avec La Lancée, une initiative gouvernementale qui souhaite contribuer de manière durable à l’avancement des filles et des femmes dans le sport, le plein air et l’activité physique.

Un triathlon revisité

Anabelle s’est longtemps questionnée sur le défi qu’elle voulait accomplir. Elle savait qu’elle avait soif d’aventure, mais de quelle aventure exactement ? Elle a donc décidé de créer son propre périple, une espèce de triathlon revisité. Le grand départ s’est fait à Saint-Denis-de-Brompton, dans les Cantons-de-l’Est. C’est le début de la première étape : 715 km de vélo pour se rendre jusqu’au Mont-Albert en Gaspésie. Elle campera de façon autonome, tout au long de la route verte qui la mènera jusqu’à la deuxième étape : la marche. En empruntant le Sentier international des Appalaches (SIA) du pied du Mont-Albert jusqu’à la pointe du Parc National Forillon. Ce sont 250 km de randonnée qui l’attendent, pour un total d’environ 25 jours avant de débuter la dernière portion du triathlon. L’étape ultime, c’est un 250 km de rame océanique. Du parc Forillon jusqu’aux Îles-de-la-Madeleine, c’est l’étape qui représente le plus grand défi pour Anabelle. Celle qui a toujours été fascinée par l’océan n’avait jamais cru un jour se donner le défi d’y ramer pendant plusieurs jours. Avec la fatigue accumulée des semaines précédentes, Anabelle devra sortir de sa zone de confort et suivre son intuition pour relever ce défi de taille. C’est finalement au mois d’aout que le périple prendra fin, alors qu’elle atteindra L’Île-du-Havre-Aubert aux Îles-de-la-Madeleine. L’arrivée est prévue autour du 8 aout.

La préparation

Anabelle a commencé ses démarches seules, mais, aussitôt que les plans se sont concrétisés, ses parents se sont joints à cœur joie avec elle dans l’aventure. Elle se considère comme choyée d’être si bien entourée. Une épreuve aussi exigeante demande une grande équipe, pour l’organisation, la vision, les connaissances, l’expertise, le matériel technique, le financement et le support émotionnel, et Anabelle peut compter sur son équipe de proches et de professionnels.

Elle a une équipe dédiée au tournage qui viendra la rejoindre ponctuellement tout au long du périple afin de documenter le plus adéquatement possible son aventure et de faire passer son message de la meilleure façon possible. Afin de planifier ses repas pour son expédition d’une cinquantaine de jours, Anabelle a fait affaire avec Émilie Richard, une nutritionniste sportive. Entraîneurs, équipe médicale, consultant en psychologie sportive ont également fait partie intégrante du processus de préparation.

Pour la portion rame du défi, la plus angoissante pour l’athlète, Anabelle a su compter sur l’expertise de Mylène Paquette, la navigatrice québécoise qui a été la première personne du continent américain à franchir à la rame en solitaire l’océan Atlantique Nord. Mylène a confié à Anabelle les techniques de rame qui lui permettront de se rendre à destination.

Une épreuve de si grande ampleur prend également du financement suffisant. Anabelle a eu la chance de dépasser son objectif lors de sa campagne de sociofinancement qui lui a rapporté plus de 100 000 $. L’athlète a donc tout ce qu’il lui faut pour accomplir son défi et transmettre son message.


Crédit image @La Tribune

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