Une rentrée frustrante pour les universités anglophones 

Par Jacob Fontaine 

Personnes étudiantes qui assistent à un cours universitaire.

La rentrée universitaire est une période d’effervescence sur les campus. Pour Concordia et Bishop’s, elle a toutefois un goût amer. Les nombreuses interventions gouvernementales des derniers mois sont venues mettre la hache dans une de leur richesse : l’afflux d’étudiants internationaux. Cette baisse importante d’inscriptions impose une pression substantielle sur leur finance. 

Selon des données obtenues par La Presse canadienne, l’Université Bishop’s a connu une baisse d’inscriptions de personnes étudiantes internationales de 40 %. Le chiffre s’élève à 10 % pour les personnes étudiantes canadiennes hors Québec. Du côté de Concordia, les chiffres sont semblables. L’Université a subi une baisse de 28 % pour les personnes en provenance de l’extérieur du Canada et 11 % pour celles des autres provinces. 

Selon son recteur Graham Carr, cette baisse entraine une perte de 15 millions de dollars. Elle s’additionne au déficit de 30.9 millions déjà enregistré durant l’exercice financier de 2023-2024. Alors que des décisions doivent déjà être prises pour régler la situation, M. Carr craint que l’offre de cours et la qualité de l’enseignement soient à risque. McGill et Concordia tentent présentement de faire renverser la décision du gouvernement provincial devant les tribunaux. 

Le recteur de l’Université Bishop’s, qui avait réussi à être exempté des hausses, pointe du doigt un discours politique québécois et canadien peu intéressant pour les personnes étudiantes intéressées par la province. 

En automne dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur Pascale Déry, accompagnée par le ministre de la Langue française Jean-François Roberge, ont annoncé des prix planchers annuels pour les personnes étudiantes provenant de l’extérieur du Québec. Ainsi, pour les personnes issues de l’international, on passait d’un prix moyen de 17 000 $ à un minimum de 20 000 $. Pour les personnes canadiennes hors Québec, le saut était encore plus considérable, passant de 8992 $ à 17 000 $. 

La vague de mobilisation étudiante et les pressions de la part des rectorats avaient limité cette hausse à 12 000 $. L’Université Bishop avait, quant à elle, été complètement exemptée. 

Des mesures difficiles 

« Lorsque des dizaines de milliers de personnes arrivent sur l’île de Montréal sans maîtriser le français, c’est évident que ça peut avoir un effet anglicisant sur la métropole », avait affirmé le ministre Roberge lors de l’annonce des nouvelles règles en automne dernier. Le gouvernement de François Legault avait justifié les nouvelles règlementations par la nécessité de freiner l’anglicisation de la métropole. 

Peu de temps après, le gouvernement fédéral avait annoncé un plafond sur le nombre de visas d’étude accordés, avec comme objectif de réduire de 35 % l’afflux de personnes étudiantes étrangères. Pour Étienne Paré de l’Union Étudiante du Québec, cette façon de faire était, depuis le début, une voie risquée. « Prendre de l’argent d’une université pour en payer une autre n’est pas une vision durable pour l’enseignement supérieur : c’est déshabiller Pierre pour habiller Paul ». 

Devant un financement public insuffisant pour les personnes québécoises, qui ont leurs frais d’études règlementés, plusieurs institutions sont contraintes à combler leur déficit avec les revenus provenant des personnes étudiantes étrangères. La dérèglementation leur permettait de charger un montant correspondant à leur besoin, tout en restant compétitif. Les nouvelles mesures compliquent la tâche en imposant des montants si élevés qu’ils sont dissuasifs, privant les universités de précieux fonds. 

« Nous n’avons jamais rien vu de tel. Évidemment, pour l’université, c’est très problématique en termes d’impact sur notre financement », conclut Graham Carr. 


Crédits: Ludovic Godard UFC

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