Par Sara Yacoub, membre du comité féministe de l’AGED
Lors des mois d’hiver, plusieurs initiatives sont mises en place afin de protéger les personnes itinérantes, qui n’ont pas de logement où se réfugier, de la température glaciale. Toutefois, malgré l’existence de refuges pour femmes, certains enjeux spécifiques aux femmes itinérantes ne sont pas abordés par ces organismes, ou s’ils le sont, une piste de solution spécifique n’est pas encore déterminée.
Les femmes itinérantes sont souvent oubliées, que ce soit dans les cercles féministes ou dans les organismes visant à aider la population itinérante. En effet, les femmes itinérantes sont plus vulnérables à vivre des violences en raison de leur genre.
Se réfugier sans peur
Tel que constaté par Le Devoir, plusieurs femmes itinérantes ont reporté avoir été agressées dans des refuges mixtes, ou encore craignent de s’abriter dans ces refuges par peur de vivre des violences à caractère sexuel. Les sources de ces craintes sont multiples, qu’elles soient causées par des expériences passées dans des refuges mixtes ou encore par des traumatismes d’enfance, ce qui laisse peu d’options pour s’abriter.
Parallèlement, les refuges pour femmes doivent souvent rejeter des femmes à leurs portes par manque d’espace. En effet, Le Devoir rapporte que l’année dernière, le Partenariat pour la prévention et la lutte à l’itinérance des femmes, regroupant cinq refuges pour femmes à Montréal, a dû refuser 25 119 demandes par manque d’espace.
Il faut souligner que les violences à caractère sexuel vécues par les femmes en situation d’itinérance ne sont souvent pas signalées, et ce pour plusieurs raisons. D’abord, puisqu’elles sont dans une situation précaire, où elles ne savent pas si elles pourront s’abriter pour la nuit, si elles pourront manger cette journée-là, rapporter une agression sexuelle n’est pas en haut de leur liste de priorités. De plus, plusieurs femmes ont normalisé ce genre de comportement, après des années d’itinérance, et donc n’en parlent pas.
Une hygiène menstruelle difficile
Un autre enjeu majeur est la précarité menstruelle, qui s’exacerbe en situation d’itinérance. Tel que rapporté par le Réseau québécois d’action pour la santé des femmes, les femmes en situation d’itinérance ne peuvent s’approvisionner de produits hygiéniques que lorsqu’elles sont en refuge, les produits étant fournis que pour la durée de leur hébergement. Elles ne peuvent donc pas recevoir des produits pour les autres journées où elles seront à la rue.
Les maisons d’hébergement manquent de ressources afin de pouvoir donner des produits menstruels, dont le coût ne cesse de s’élever. De plus, leur chèque d’aide sociale arrive à peine à couvrir le strict nécessaire pour les femmes itinérantes, ce qui les mène à des solutions inconventionnelles et inconfortables, comme utiliser du papier journal emballé dans du papier de toilette.
Le droit à un logement convenable, faisant partie du droit à un niveau de vie suffisant, est reconnu par les Nations Unies comme un droit fondamental. Le revenu d’une personne — ou le manque de ce dernier — ne devrait pas justifier la présence de violences à caractère sexuel au quotidien ni le manque d’accès à des produits d’hygiène.
Source: Chez Doris