Par Chloé Gueydan
Le 17 octobre 2018, le cannabis sera légalisé au Québec pour les personnes de 18 ans et plus. Bistrobrain, 11 septembre 2018. Collectif d’étudiantes et d’étudiants de l’université de Sherbrooke ainsi que plusieurs intervenants.es montent la conférence « La capsule » au bistro-cinéma afin d’éclairer le sujet et aller plus loin à travers différentes approches.
BistroBrain, c’est quoi?
C’est avant tout de la diversité! Ce sont 5 étudiants de l’UdeS provenant de différentes formations qui, depuis presque 2 ans, organisent des 5@7 liés à leurs recherches pour le grand public. Une pluralité de savoirs au service de la vulgarisation scientifique et de sa diffusion! Lors de cette soirée, 3 présentations interactives s’enchaînent dans la salle au style cabaret située au 38 rue Wellington Sud.
Une approche sociale en entrée
L’organisme communautaire autonome ELIXIR, fondé en 1984, a pour principale mission de soutenir les femmes et de réduire les conséquences négatives liées à la consommation de substances psychoactives telles que le cannabis, l’alcool, le tabac, la cocaïne et MDMA. L’organisme, en plus d’être une démarche de santé publique, pratique également des animations, des formations, des conférences, des forums et est présent en milieu festif avec « la Halte », toujours dans l’objectif d’une communication ouverte, non stigmatisant, sans jugement ou préjugés. Si l’on devait retenir une chose de la présentation de Nicolas Perron Trudel lors de cette soirée, c’est sans doute la loi de l’effet. Autrement dit, l’effet que va avoir une substance psychoactive va dépendre de la substance (type, quantité, fréquence, qualité), de l’individu (âge, taille, poids, état de santé et d’esprit) et du contexte (lieu, moment de la journée, entourage…) Soit E= (S)x(I)x(C) pour ceux qui apprécient les formules! Aujourd’hui, il faudra être capable de différencier la légalisation du cannabis de sa promotion ainsi que de combler le manque d’information sur sa consommation avec d’autres médications.
Une approche scientifique en plat de résistance
Jérôme Côté, pharmacologue et chercheur dans un laboratoire sur la douleur chronique, avait pour sujet de présentation « le fentanyl et le cannabis font les manchettes ». Le but de la recherche consiste à trouver des alternatives aux opioïdes qui présentent des effets secondaires sévères, voire mortels. En effet, entre 1999 et 2010, plus de 100 000 décès sont liés à l’usage des opiacés. Une overdose d’opiacés se produit sous forme de dépression respiratoire. Elle peut être intentionnelle ou accidentelle, mais également d’iatrogénique, c’est-à-dire due à une prescription médicale. Le surdosage est lié à la dose et à la molécule, en comparaison au fentanyl, qui est une molécule 100 fois plus active que la morphine, qui a un effet 100 fois plus puissant que la morphine, mais avec la même dose. Les mécanismes de tolérance et de dépendance chez l’individu sont alors déterminants des effets négatifs liés aux opioïdes, tels que les symptômes de sevrage. Le cannabis pourrait être une alternative aux opioïdes dans un contexte médical où l’on pourrait sélectionner quelle molécule à administrer au patient. La légalisation va pouvoir aider la recherche à avancer sur la médication via les cannabinoïdes, laquelle est encore très controversée.
Une approche législative en dessert
Jocelyn Beaudoin, avocat spécialisé en droit du travail et des affaires, présente son approche sur l’impact de la légalisation du cannabis sur le lieu de travail. Différentes interrogations se profilent suite à ces nouvelles lois et à leurs applications. Le projet de loi 157 adopté le 12 juin 2018 est assez varié. Pour citer son contenu principal, cette loi encadre bien évidemment la consommation de cannabis, mais également la production et l’entreposage, la vente et ses accessoires, la limitation de la promotion et de la publicité par des comités de vigilance, la création de la SQDC « Société québécoise du cannabis » et les fonds de recherche et de prévention qui devraient constituer 100% des bénéfices. Il sera interdit de fumer dans de nombreux lieux publics. En ce sens, l’article 21 vient préciser qu’en vertu du « droit de gérance de l’employeur », toute forme d’usage du cannabis peut être proscrite, au-delà de fumer sur son lieu de travail. Cela peut correspondre à être juste sous emprise du cannabis. Dans un milieu syndiqué, le pouvoir des conventions collectives va aussi avoir son effet. De plus, selon l’article 49.1, un employé ne doit pas se présenter au travail sous influences. Ou encore, l’employeur doit s’assurer de l’état physique de ses employés (article 51.1) ce qui engage des tests aléatoires qui doivent être justifiés, car ils remettent en cause la vie privée de l’individu et sont considérés comme « intrusifs ». La légalisation demandera des politiques internes beaucoup plus rigides et développées.
Crédit Photo @ Yohann Chiu