Par Sarah Gendreau Simoneau
L’artiste Lem, qui manie les mots et la parole de brillante façon, a présenté son seule en scène sur la résilience, Des limbes à la surface, pour la première fois sur une scène sherbrookoise pour souligner la Semaine de prévention du suicide.
L’artiste se sent soulagée dans ce qu’elle appelle « l’aboutissement » de quelque chose qui bouge enfin. « Je ne veux pas rater la vague, mais je stresse un peu. » Slameuse, poétesse et autrice, elle jongle avec les différentes plateformes et scènes pour amener le mieux-vivre dans la tête du public.
Lem présente son seule en scène à Montréal depuis quelque temps déjà, mais elle n’avait encore jamais exposé son matériel scénique ici, chez elle, bien qu’elle fasse salle comble à Montréal. Le spectacle solo avait lieu le 2 février dernier, au Centre culturel le Parvis de Sherbrooke.
L’artiste livre au public, sans pudeur, ses confidences sur des fragments de sa vie et la façon dont elle a réussi à guérir de son passé. Violences sexuelles, verbales, tout y est, mais tout finit bien.
Même si elle se raconte en poèmes, en slams et en chansons (sans musique), elle a de la difficulté à qualifier le tout de spectacle. « C’est pas un show sur ma vie. C’est plus de vouloir inspirer les gens avec la résilience que j’ai eue pour traverser tout ce que j’ai vécu. Je suis en paix aujourd’hui avec mon passé, mais aussi avec les gens qui m’ont forgée, ou au contraire, ne l’ont pas fait », exprime l’artiste. Lors de la soirée, elle a d’ailleurs voulu expliquer son choix de ne pas avoir de musique avec elle. D’emblée, les gens l’avaient déjà adoptée telle quelle.
Au début, dans le vif du sujet de ce qu’il lui est arrivé, l’artiste déballe tout au public, là pour écouter oui, son histoire d’horreur, mais aussi beaucoup le chemin qu’elle a parcouru, sa guérison, ainsi que la résilience dont elle a su faire preuve et qui lui permet de vivre aujourd’hui.
Lorsque les gens applaudissent à la fin, elle les remercie et leur demande d’applaudir une deuxième fois, mais pour eux-mêmes. « S’ils sont là, c’est parce qu’ils ont envie que quelque chose change dans leur vie. C’est pour ça qu’ils doivent s’applaudir, pas pour moi ! »
Depuis quelques années, Lem se produit dans des compétitions de slam, à Montréal. Elle a déjà présenté quelques textes sur le thème de la résilience, de la guérison malgré les tourments du passé, sans que quelque chose de concret en ressorte. Finalement, ces textes s’intègrent bien dans sa prestation solo qui, pour elle, s’avérait être « une belle catharsis ».
« Aujourd’hui, la démarche est différente. Ce n’est plus pour dire que j’ai guéri : c’est pour dire aux gens que, peu importe ce qu’ils ont vécu, il faut aller chercher les éléments qui pourront leur servir pour se sortir de tout ça. »
Lem n’a pas le choix, elle doit raconter les côtés plus difficiles et sombres de sa vie, mais la majorité de la prestation relate les démarches, les outils utilisés par l’artiste, qui l’ont menée jusqu’à la résilience qu’elle porte aujourd’hui.
« Beaucoup de gens viennent me voir, lors des discussions ouvertes après les représentations, pour me dire que ce qu’ils ont vécu, ce sont des montagnes russes d’émotions. Pour moi, ça veut dire que ma mission est remplie, puisque c’est ce que j’ai vécu tout au long de ma vie. »
Une exposition de mots
Lem a imprimé les textes qu’elle cite sur scène, afin de les exposer dans la salle du Parvis. C’est la première fois qu’elle fait ça. « Ma fille de 13 ans, qui connaît mon histoire, s’est portée volontaire pour créer des illustrations qui accompagnent les textes », explique-t-elle.
Gabrielle Dupuis, directrice générale du Centre culturel Le Parvis, semblait ravie, selon l’artiste, de pouvoir « habiller le seule en scène », parce qu’elle est d’avis que l’histoire de Lem mérite d’être racontée et vue. L’exposition est en place jusqu’au 24 février.
« C’est aussi la première fois que la représentation est appuyée par des partenaires. JEVI et le Calacs Estrie avec, j’espère, des femmes qui fréquentent le lieu de vie, seront là. La Ville de Sherbrooke nous soutient aussi parce que c’est un événement qui est financé par la démocratisation de la culture en Estrie. Je suis très contente », précise celle qui est appuyée dans sa démarche par France Castel.
L’actrice a en effet signé la préface du livre de Lem, Et si les murs avaient su parler, en 2021. Elle avait d’ailleurs préparé une petite vidéo pour Lem et les gens dans la salle ; le projet lui tient à cœur.
Porte-parole, une corde de plus à son arc
Pour Des limbes à la surface tout comme pour ses conférences sur la réappropriation de soi, Lem a été choisie, cette année, pour être la porte-parole de la Fondation des petits trésors. Son chemin croise donc celui d’enfants et d’adolescents d’écoles de Montréal où elle présente des ateliers sur la santé mentale, surtout.
« Aux enfants de 6 à 12 ans, je parle beaucoup de croire en soi et de ne pas avoir peur de réaliser ses rêves. À travers l’histoire du grand voyage d’un petit escargot, je leur raconte que mon jardin était devenu trop petit pour moi. J’ai eu envie de parcourir le monde et de réaliser mes rêves. Je me retrouve ici, à l’autre bout du monde, et je suis devenue ce que je voulais être », image la conférencière.
Avec les ados, elle aborde l’estime de soi et l’importance de celle-ci à travers tout ce que l’adolescence peut apporter. Lem a compris, avec son parcours de résilience, que l’enfance ne doit jamais être oubliée pour que chaque être puisse évoluer dans la vie. Ses expériences teintent ses ateliers et ses conférences. Aucune tranche d’âge n’est délaissée dans le passage vers la guérison et la paix intérieure.
« Qu’on y croie ou pas, qu’on en soit conscient ou pas, tout le monde porte la résilience. C’est le message que je veux passer », souligne l’artiste.
Crédit image @Facebook Centre culturel Le Parvis