Par Ema Holgado
En avril prochain sera publié, chez Gallimard, un nouvel ouvrage du célèbre écrivain français Louis-Ferdinand Céline, mort en 1961, intitulé La Volonté du roi Krogold.
Ce roman est le dernier qui sera publié à partir des manuscrits de l’auteur retrouvés après sa mort. Pourtant, l’auteur a, depuis toujours, été contesté pour ses positions antisémites qui n’ont plus aujourd’hui le luxe de s’inscrire dans l’air du temps et font polémiques au XXIe siècle.
Qui est Céline ?
Louis-Ferdinand Destouches, né en 1894 et mort en 1962, est un auteur français connu sous son nom de plume Céline. Habitant à Paris avec sa famille, mais faisant des séjours réguliers en Allemagne, Céline rejoint l’armée en 1912 et vivra les débuts de la Première Guerre mondiale au front. Son expérience dans les tranchées lui inspirera des anecdotes pour plusieurs de ses romans tels que Mort à crédit, certains passages de Voyage au bout de la nuit ou encore Casse-pipe. Après une blessure qui lui doit d’être décoré, mais surtout d’être jugé inapte au combat, les horreurs qu’il a vues durant la guerre feront de lui un pacifiste, mais surtout un pessimiste dans sa vision de la vie.
Fervent adepte de l’Allemagne nazie, il collaborera avec le régime durant la Seconde Guerre mondiale et sera contraint de fuir la France pour l’Allemagne à la fin de la guerre. Sa fuite donnera lieu à la publication d’une trilogie à succès sur cette dernière qui le remet sur le devant de la scène. Il mourra en 1961 dans un pavillon en campagne française où il vivait depuis plusieurs années.
La Volonté du roi Krogold, nouveau roman retrouvé
Cette année encore, le célèbre auteur français fait partie des sorties littéraires attendues de l’année. S’il est vrai que Céline a disparu depuis un peu moins de 60 ans, cette sortie littéraire s’inscrit dans ses romans publiés après sa mort provenant de ses manuscrits retrouvés et retravaillés pour publication. Ces manuscrits, qui lui avaient été volés à la fin de la Seconde Guerre mondiale, ont été retrouvés en 2021 à la suite d’un dépôt anonyme à un journal français. Nous savons maintenant que ces 1 200 feuilles de manuscrit avaient été confisquées par un résistant de la Seconde Guerre mondiale. Lors de chacune des nouvelles parutions posthumes de l’auteur, ce sont entre 20 000 et 200 000 exemplaires de ses livres qui se sont vendus, un vrai coup de publicité pour la maison d’édition qui n’hésite pas à republier certains autres de ses romans par le même coup.
Ce nouvel ouvrage, un conte médiéval intitulé La Volonté du roi Krogold, paraitra le 27 avril prochain. Le roman raconte « la guerre menée par le Roi Krogold contre le prince félon Gwendor, le meurtre du procureur Morvan par le trouvère Thibaut, la passion de Joad pour la belle Wanda », selon La Presse. Gallimard publiera deux versions de l’œuvre. La première, tapée à la machine par l’auteur en 1930, intitulée La Légende du roi René, et la seconde datant de 1940 représentant une seconde version de l’histoire, très différente du premier manuscrit.
Ce nouvel ouvrage est très différent de ce que nous a proposé jusqu’à maintenant Céline avec ses romans réalistes et contemporains. À l’époque, la maison d’édition de l’auteur avait même refusé de publier ce roman en raison de cette différence de style qu’elle jugeait très loin de ce que proposait l’auteur.
Un auteur polémique
Malgré la renommée des romans de Céline, de nombreuses voix s’insurgent, depuis plusieurs décennies, d’autant plus depuis la republication de ses œuvres, de les voir mis de l’avant en raison de ses idéologies racistes. Louis-Ferdinand Céline se disait ouvertement le plus grand ennemi des juifs.
Antisémite violent, publiant articles et pamphlets en tous genres ouvertement hostiles aux juifs, Céline est très proche des groupes d’extrême droite pronazis. Si nous ne savons pas aujourd’hui la nature réelle de ses liens avec les services de sécurité de l’Allemagne nazie, nous savons tout de même qu’il a été mis au courant et a approuvé la solution finale visant à exterminer, par les camps de concentration, tous les juifs d’Europe. Ses propos contre les juifs sont d’une telle violence qu’il sera condamné à la fin de la guerre pour ses propos et sa collaboration, même s’il sera ensuite amnistié. En plus de cette violence contre le peuple juif, Céline était aussi raciste envers de nombreuses autres communautés de couleur.
C’est la raison pour laquelle beaucoup se demandent aujourd’hui si l’on peut toujours célébrer Céline et son œuvre, surtout à une époque où ces comportements ne sont plus du tout acceptés. Il faudra attendre avril pour juger de ce dernier ouvrage et il conviendra aux lecteurs de choisir de le lire ou non.
Crédit image@Yannick Stephant
