L’interprétation, un art tout en finesse

Par Camille Sévigny 

C’est jeudi le 25 novembre dernier qu’avait lieu la deuxième classe des maîtres du BEAM, une initiative locale mettant en lumière différents aspects du cinéma. Sous forme de conférences avec plusieurs personnes professionnelles du milieu, celles-ci sont présentées par le Bureau estrien de l’audiovisuel et du multimédia (BEAM) et La Maison du Cinéma.  

Ce deuxième évènement recevait Emmanuelle Laroche, actrice, réalisatrice, et directrice d’acteurs pour ne nommer que certains des titres qu’elle a accumulés au fil des ans. Cette dernière s’est exprimée avec ferveur, humour et passion sous forme de partage et d’analyse tout à fait familière. 

Une personne d’expériences 

Avec plus de 15 ans d’expériences diverses dans le milieu culturel québécois, dont au théâtre et à la télé (C.A. [2008], Au secours de Béatrice [2014-15], etc.), cette artiste pluridisciplinaire a d’abord entamé des études en musique classique, avant de faire le saut à l’École Nationale de Théâtre.  

Ayant aussi étudié en enseignement de l’art dramatique à l’UQUAM, elle sait autant jouer que diriger, un atout la rendant particulièrement outillée pour partager sa vision de l’interprétation. Établie en Estrie, elle réalise aujourd’hui des documentaires en collaboration avec son conjoint, aussi réalisateur et directeur de photographie. 

Mettre en scène les joies et peines de la vie  

Ayant choisi le drame américain Manchester by the Sea (2016) comme sujet d’analyse, la comédienne désirait souligner différents éléments importants du jeu des acteurs qui y sont apparents, tels que les silences et l’écoute entre les acteurs/actrices. Écrit et réalisé par Kenneth Lonergan, le film nous raconte l’histoire de Lee Chandler (Casey Affleck), un concierge aux tendances colériques et au passé trouble, qui devient gardien temporaire de son jeune neveu, Patrick (Lucas Hedges), suivant le décès soudain de Joe (Kyle Chandler), son frère.  

Ensemble, ils devront faire leur deuil, un processus qui ravivera les blessures du passé qui hantent Lee, dont le décès accidentel de ses enfants dans un incendie, qui mena aussi à son divorce avec sa femme, Randi (Michelle Williams). Nominé dans plusieurs catégories aux Oscars et aux British Academy Film Awards de la même année, le film fut acclamé pour son scénario percutant et le jeu touchant d’Affleck, Williams et Hedges. Les prix du meilleur acteur et du meilleur scénario original furent remportés par Affleck et Lonergan lors de ces deux cérémonies, faisant état de la qualité du produit final. 

Déconstruire l’invisible 

Après avoir fait un retour sur son parcours professionnel, Emmanuelle Laroche a invité le public à visionner le film choisi avec minutie, en portant une attention particulière au jeu des acteurs et actrices. Après la projection du film, la comédienne a ensuite décortiqué certains des aspects saillants ce celui-ci. Il fut entre autres question de la fluidité avec laquelle Affleck et Hedges exécutent leurs dialogues, en frôlant l’improvisation quant à leurs expressions et les émotions qu’ils véhiculent.  

Alors que le premier retient toute forme de démonstration de souffrance et de deuil, sauf dans des excès de colère soudains, le deuxième, exprime beaucoup plus aisément celles-ci, démontrant la divergence des épreuves qu’ils ont tous deux vécues au cours de leurs vies. Laroche souligna ainsi que, tandis que le théâtre trouve succès dans l’exagération, le cinéma est beaucoup plus percutant grâce à la retenue, puisque l’impact sur les spectateurs lorsque certaines émotions sont exprimées en est magnifié.  

L’importance d’un bon scénario 

La présentatrice invitée a aussi souligné l’aisance avec laquelle le scénario juxtapose humour et tragédie tout au long de l’œuvre, donnant aux acteurs la possibilité d’interpréter des personnages complexes et vraisemblables auxquels le public peut s’identifier ou du moins, développer de l’empathie. Finalement, elle aborda aussi les difficultés techniques que peuvent vivre les comédiens lorsqu’ils ou elles ont à jouer des personnages complexes, afin d’en laisser paraître assez pour garder le public en haleine, sans toutefois révéler l’entièreté de leurs souffrances pour faire durer le suspense.  

Elle expliqua que certains doivent trouver ce qui déclenche en eux une réponse émotionnelle qui s’apparente à celle recherchée par le réalisateur ou la réalisatrice. Selon elle, le secret est surtout de bien se connaître, d’apprendre à travailler avec les outils mis à sa disposition et surtout de s’entraîner à transmettre la bonne émotion. S’exercer à jouer petit, plutôt que trop gros.  

Encourageons les initiatives locales! 

Elle conclut en disant qu’elle ne décourage jamais ses élèves à poursuivre leur rêve de percer dans le domaine du cinéma ou de la télévision, car le potentiel se construit petit à petit, avec persévérance et passion. Ce fut une expérience enrichissante pour les cinéphiles présents, l’enthousiasme de Mme Laroche envers son domaine de prédilection étant contagieux. 

Si vous avez une passion pour le cinéma et voulez en apprendre davantage sur ses différentes facettes, n’hésitez pas à vous rendre à la prochaine classe de maître du BEAM. Le 9 décembre prochain, La Maison du Cinéma accueillera Louka Boutin, qui parlera plus en détail de la direction photo, qu’il analysera dans le film Blue Valentine de Derek Cianfrance. Les billets sont en vente sur la plateforme Web du BEAM.  

Plusieurs autres évènements musicaux sont aussi à venir au cours du mois de décembre, dont celui de Clement Jacques, un ancien participant de La Voix 2020, qui aura lieu le 11 décembre prochain, directement au BEAM. Finalement, le spectacle Hallelujah Leonarden hommage au poète et chanteur Leonard Cohen, aura aussi lieu au BEAM le 18 décembre prochain.


Crédit photo @ Le Beam

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