Une polémique insidieuse

Par Sandrine Martineau-Pelletier 

La violence sexuelle est plus courante qu’on le pense, surtout en milieu universitaire. Douze chercheurs de six universités différentes ont entrepris une enquête afin de dénoncer ces actes de violence dans les universités québécoises francophones. Les conclusions parlent d’elles-mêmes.

La violence sexuelle se cache sous plusieurs formes. Bien qu’on entende souvent parler d’agression sexuelle, le harcèlement, la coercition (chantage pour des faveurs) et les comportements sexuels non désirés (comportements verbaux ou non verbaux) sont tous considérés comme des actes de violence sexuelle.

Les conséquences de ces actes sont graves pour les victimes. En effet, près d’une victime sur deux (47,3 %) s’est dite affectée dans sa vie personnelle ou professionnelle. Une victime sur dix vit même un état qui s’apparente au choc post-traumatique à la suite de l’agression.

Ces données proviennent de l’ESSIMU (Enquête sur la sexualité, la sécurité et les interactions en milieu universitaire), une enquête provinciale qui a questionné les expériences de 9 284 personnes répondantes, étudiant(e)s et employé(e)s universitaires, en matière de violence sexuelle. L’Université de Sherbrooke et cinq autres universités québécoises francophones ont participé à l’enquête.

Parmi les conclusions des recherches, on peut y lire que « plus du tiers (36,9 %) des [répondants ou répondantes] ont rapporté au moins une forme de victimisation sexuelle. » Une personne sur trois est donc victime de violence sexuelle. Bien que les hommes puissent en être sujets, ce sont majoritairement les femmes qui subissent les violences sexuelles.

La culture du viol

Une des premières causes de la grande fréquence de ces actes est la culture du viol. Voici sa description en quelques phrases :

« Elle avait juste à ne pas porter de mini-jupe. » – La responsabilisation de la victime;

« Il n’a certainement pas fait ça, c’est trop un bon gars. » – La négation ou la minimisation du viol;

« Elle disait non, mais en fait, elle le voulait. » – La négation du non-consentement.

Les trois composantes principales de la culture du viol (écrites après leurs exemples respectifs) regroupent l’ensemble des pensées qui définissent cette culture, celles-ci alimentant la tolérance de la population face au viol.

Malgré son impact indésirable, la culture du viol est malheureusement toujours très présente dans les universités. En effet, entre 7,1 % et 38,7 % des répondants et répondantes au sondage de l’ESSIMU se disaient neutres ou favorables aux pensées de la culture du viol. Cette pensée populaire pourrait alors expliquer que la gêne et la peur empêchent plusieurs victimes de dénoncer leurs agresseurs. L’ESSIMU précise en effet que seulement 9,6 % des victimes de violence sexuelle en milieu universitaire dénoncent la situation au corps universitaire.

Bien que la dénonciation soit rare, elle a porté fruit lors des initiations de la délégation de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) pour les Jeux de la communication (JDLC) 2016.

Les initiations de l’UQO

À l’automne dernier, le comité organisateur des initiations de la délégation des JDLC de l’UQO a établi une liste de gestes à poser pour accumuler des points dans le cadre des initiations. Dans cette liste, on pouvait y retrouver « prendre une photo d’un sein » et « prendre en photo une brassière ». Le groupe d’initiés et d’initiées était également encouragé à participer à un concours de wet T-shirts et à apposer une signature sur les fesses d’un ou d’une camarade.

Bien que le comité organisateur se soit excusé de ces événements, ces jeux à caractère sexuel ont presque expulsé la délégation de l’UQO des JDLC 2016. Pour contrer l’association de ces actes à la réputation de la compétition interuniversitaire, les JDLC 2017 se sont associés au mouvement Sans oui c’est non!, une campagne voulant prévenir les violences sexuelles dans les universités. En sensibilisant la communauté étudiante, cette campagne veut outiller les gens contre la violence sexuelle et promouvoir les ressources disponibles pour les victimes de ces agressions.

Le plan d’action de l’ESSIMU

Tout d’abord, l’ESSIMU avait pour but de sensibiliser la population à l’interne et à l’externe des universités aux violences sexuelles faites dans les milieux universitaires québécois. Toutefois, sensibiliser n’est que la première étape. Les chercheurs de l’enquête souhaitent aussi mettre en place des moyens de prévention, tels que s’assurer que l’environnement physique de la population étudiante est sécuritaire, créer des programmes d’éducation et de formation pour la communauté étudiante, ainsi que continuer la recherche pour approfondir les connaissances sur le sujet.

La campagne Sans oui c’est non! est entre autres un des outils pour sensibiliser la population au consentement. Des affiches sont présentes dans plusieurs universités, dont l’Université de Sherbrooke, et des objets promotionnels affichant le slogan de la campagne sont également vendus aux étudiants.

Si vous avez été victime d’une agression sexuelle, vous pouvez appeler au 1 888 933-9007 pour obtenir de l’aide gratuitement (7 jours sur 7 et 24 heures sur 24).
Victime, témoin ou simplement curieux? Visitez le site de la campagne Sans oui c’est non! 


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