De la recherche sur le français, au Québec 

Par Laurie Jeanne Beaudoin 

Le Centre de recherche interuniversitaire sur le français en usage au Québec de l’Université de Sherbrooke (CRIFUQ) regroupe douze professeurschercheurs répartis entre cinq universités québécoises. Leurs travaux de recherche font partie d’un champ unique. Voyez comment il est possible d’étudier le français au Québec, outil quotidien et marque de notre culture.  

Dans les mots du directeur du Centre et professeur titulaire, Wim Remysen, le CRIFUQ c’est « un centre qui regroupe des linguistes qui s’intéressent spécifiquement à l’étude du français au Québec ». Le Centre accueille aussi plusieurs professionnels de recherche qui collaborent à des projets spécifiques et des étudiants et étudiantes en linguistique, qui rédigent leur mémoire ou leur thèse, supervisés par des professeurs du CRIFUQ.  

Historiquement le CRIFUQ a vu jour à l’Université de Sherbrooke. Auparavant, il était connu sous le nom de Centre d’analyse et de traitement informatique du français québécois (CATIFQ). Depuis 2015, le centre a intégré des chercheurs d’autres universités québécoises, un grand avantage pour réunir des professeurs qui s’intéressent aux mêmes questions de recherche et aux enjeux de société de nature linguistique.   

Exploration de nos pratiques linguistiques 

La recherche sur le français au Québec est un champ très vaste et, concrètement, la question langagière québécoise est abordée selon deux angles complémentaires par l’équipe du CRIFUQ. Tout d’abord, il y a des chercheurs qui s’intéressent à la langue du point de vue systémique : les mots qu’on utilise dans le contexte québécois, les traits de prononciation qui caractérisent notre français, la variation qui l’affecte, etc. Puis, d’autres chercheurs se penchent plutôt sur les discours ambiants qui circulent à propos de la norme ou de la qualité du français en contexte québécois, dans le but de mieux comprendre les rapports et l’attachement identitaire des Québécois avec leur langue. Les langues varient et évoluent en fonction des différents phénomènes ou implications sociales importants. « Tous ces aspects font partie de l’étude de la langue que nous utilisons », ajoute le directeur du CRIFUQ. Rappelons-nous qu’un des objectifs du CRIFUQ est de contribuer à la compréhension des rapports que les Québécois entretiennent avec la langue française.  

Projets de recherche en cours 

À l’heure actuelle, le CRIFUQ chapeaute une quinzaine de projets individuels et collectifs. 

Le projet porc-épic, mené par Nadine Vincent, professeure et responsable du baccalauréat en communication à l’UdeS, porte sur les mots polémiques reliés à divers débats de société (féminisation des titres, vocabulaire touchant les identités sexuelles et de genre, dénominations servant à désigner les Autochtones, etc.). L’analyse de ces mots, leurs effets et leur utilisation dans la presse par exemple permettront de créer des descriptions plus ouvertes qui laissent place à toutes les interprétations possibles du mot. Le tout sera accessible prochainement en ligne.  

Un des projets importants sur lesquels Wim Remysen travaille de son côté, en collaboration avec la professionnelle et coordonnatrice du Centre Paméla Vachon, est le Fonds de données linguistiques du Québec (FDLQ). Un projet qui a pour but de partager le patrimoine linguistique et culturel québécois avec le grand public et avec le milieu de la recherche, à partir d’une plateforme numérique unique.   

Gaétane Dostie, professeure au Département des arts, langues et littératures de l’UdeS, travaille sur un projet de Phraséologie dans les domaines fondamentaux. Ce projet porte sur les phrases toutes faites comme « Le chat est sorti du sac » ou « Il n’y a pas d’âge pour apprendre ». Son principal objectif est entre autres de dégager les propriétés des phrases hors contexte et en contexte pour en tirer des conclusions.  

Finalement, Louis Mercier, qui a été directeur du Centre jusqu’en 2013, et qui demeure membre associé, rédige présentement le Dictionnaire historique des noms d’oiseaux. « Étant donné qu’il s’agit d’un champ lexical particulier, une méthode a été développée par Louis Mercier pour décrire ce vocabulaire précis dans les articles traitant de la faune et de la flore dans le dictionnaire Usito », avance Wim Remysen. Enfin, un ouvrage dédié aux noms français des oiseaux du monde, à leur usage actuel comme à leur ancrage historique. 

Usito, projet phare du CRIFUQ 

Vous connaissez l’outil en ligne Usito? Il s’agit d’un dictionnaire conçu dès la fin des années 1990 par une équipe de chercheuses et chercheurs associés au CRIFUQ. Ce dictionnaire s’adresse à tous les francophones qui sont à la recherche d’un outil adapté à leur culture.  

« C’est un dictionnaire fait pour les Québécois qui ne se reconnaissent pas nécessairement dans les dictionnaires de France, écrits du point de vue européen, avec des références historiques ou culturelles qui divergent des nôtres », explique Wim Remysen. Notre français se caractérise par des usages différents du français européen qu’il est important de retrouver dans des ouvrages de référence. En ce sens, Usito permet de rendre explicite la norme du français en contexte québécois. 

Il s’agit certainement d’une des réalisations les plus importantes du Centre. D’ailleurs, comme le l’explique Wim Remysen : « faire un dictionnaire, c’est une entreprise couteuse, surtout en termes de temps, ça nécessite une équipe aussi très qualifiée ». Depuis sa diffusion en 2013, Usito a eu d’incroyables répercussions à travers la francophonie.  

Le CRIFUQ entretient encore des liens étroits avec l’équipe d’Usito qui relève maintenant de l’UdeS. L’expertise de plusieurs chercheurs membres du Centre dont d’Hélène Cajolet-Laganière, coauteure du dictionnaire, ou Nadine Vincent est encore mise à profit pour le développement du dictionnaire et la tenue de mises à jour.  

Mots de la semaine 

Depuis l’automne, sur la page Facebook et le compte Twitter du CRIFUQ ou encore sur les différents écrans du campus, vous pouvez lire « les mots de la semaine » soit une sélection de mots tirée d’Usito et choisie par l’équipe du CRIFUQ. Les mots peuvent être reliés à l’actualité ou souligner des événements historiques. Une simple façon de faire connaitre le Centre et l’outil Usito à la communauté étudiante et d’éveiller la curiosité pour l’étude de la langue. 


Crédit image @ Michel Caron, UdeS

Scroll to Top