« Bienvenue au pays de la Teranga! » : les beautés du Sénégal

Par Dorian Paterne MouketouStagiaire en coopération internationale au Sénégal

Le Sénégal, pays de l’Afrique de l’Ouest, fait partie de ces endroits dans le monde qu’on ne peut pas manquer de visiter lorsqu’on voyage. Tant pour les paysages qu’il a à offrir que pour les secrets qu’il a à révéler, le pays de la Teranga est en effet un must!

La Teranga : quand l’invité est roi

« Bienvenue au pays de la Teranga! », vous diraient fièrement les gens du Sénégal, tant fiers et conscients de l’importance que relève cette tradition si chère à leurs yeux. La Teranga est sans doute l’une des plus importantes et des plus connues des valeurs sénégalaises. Le mot, en wolof, vient de « teer/teerul », c’est-à-dire accueillir. Ainsi, la Teranga incarne l’hospitalité et le partage des populations du Sénégal. De ce fait, cette tradition suppose en premier lieu une solidarité entre gens du pays : lorsqu’un repas est partagé dans une famille, ou lors des fêtes religieuses ou familiales, le voisinage peut y être convié. En outre, au pays de la Teranga, les invités sont choyés et traités comme des rois!

La Teranga n’est pas que le synonyme de l’hospitalité sénégalaise : elle est fondamentalement un héritage culturel fièrement partagé et revendiqué, notamment entre plusieurs catégories ethniques ou affiliations religieuses. La population sénégalaise constitue une mosaïque culturelle riche et envoûtante. D’abord, du point de vue ethnique, on trouve au Sénégal les wolofs, les sérères, les diolas, les toucouleurs et d’autres groupuscules ethnolinguistiques. Ensuite, l’élément le plus frappant de la solidarité sénégalaise demeure indubitablement l’harmonie qui existe entre les différents groupes religieux, notamment entre les musulmans, majoritaires, et les chrétiens.

La coexistence pacifique entre musulmans et chrétiens 

Un des éléments les plus marquants de l’organisation socio-politique du quotidien des gens au Sénégal est la parfaite harmonie qui existe entre l’islam et le christianisme. La population du pays est composée majoritairement de musulmans, qui constituent environ 95 %.  La minorité chrétienne ne forme que 4 %, alors que les agnostiques sont évalués à environ 1 % de la population totale. Ces différences religieuses ne sont pas pour autant des sources de conflits entre les Sénégalaises et les Sénégalais. Au contraire, elles permettent d’établir des relations harmonieuses entre les gens du même pays. Par exemple, lors des fêtes religieuses chrétiennes, les consœurs et confrères musulmans sont invités à partager le repas. À l’inverse, on trouve lors des festivités musulmanes des chrétiennes et des chrétiens. Ainsi, tout le monde vit en harmonie dans une communauté nationale qui fait fi des différences.

Cette cohabitation relève, par-dessus tout, d’un besoin de former « Un peuple, un but, une foi », tel le stipule la devise officielle du Sénégal. En plus des différences au niveau des affiliations religieuses, c’est la composition ethnolinguistique du pays qui constitue la pierre angulaire de l’unité nationale. La langue dominante, et de ce fait couramment parlée, est le wolof. Pourtant, les différences religieuses et ethnolinguistiques ne posent pas de défis aux Sénégalaises et aux Sénégalais quant à l’organisation de la vie en société. Le Sénégal étant laïc, aucune religion n’a plus d’influence qu’une autre au sein de l’appareil de l’État. Preuve de cette harmonie : le premier président, le poète Léopold Sédar Senghor, était, en plus d’être sérère, un chrétien dans un pays majoritairement wolof et musulman! Il a dirigé le pays nouvellement indépendant de 1960 à 1980. 

Laïcité à la sénégalaise : quelle leçon à tirer?

Alors que la nouvelle loi sur la laïcité de l’État promulguée par le gouvernement de François Legault déchaine les passions et amène un déchirement entre les gens au Québec, l’exemple sénégalais me paraît utile à porter une attention. En effet, au Sénégal, aucune majorité n’écrase une minorité. Aucune majorité n’impose à la minorité la loi du plus fort ou la conformité aux règles du plus grand nombre. Aucune religion, aucun groupe ethnolinguistique ne discrimine un autre en votant des lois en sa défaveur. Pourtant, chrétiens et musulmans partagent leur quotidien harmonieusement. Pourtant, la laïcité de l’appareil étatique n’est pas remise en question. Du moins aucune loi sur la laïcité de l’État ne discrimine une partie de la population du pays. 

La constitution du Sénégal souligne que le pays est démocratique et laïc. Il convient de préciser que la laïcité pratiquée au Sénégal n’a pas été le résultat d’un combat entre le temporel et le spirituel. Par ailleurs, la population sénégalaise demeure attachée à ses chefs religieux. En retour, ces derniers ont une influence sur la population. La grande majorité des Sénégalais se réclame de croyances religieuses. De ce fait, la religion n’étant pas une affaire d’État, la laïcité non plus ne répond pas à une doctrine de combat contre le religieux. Ainsi, la laïcité sénégalaise tient compte de l’héritage historique et culturel du pays, et entend s’exercer dans le dessein d’assurer la coexistence harmonieuse et pacifique parmi une population multiethnique et multiconfessionnelle.

Enfin, la laïcité sénégalaise ne condamne pas Dieu à l’exil. En effet, la constitution sénégalaise repose sur deux principes : la liberté de conscience et de culte sans autre limite que celle qui se rapporte à l’ordre public, et la séparation du temporel et du religieux. Il y a là un lien à établir avec la laïcité à la française – dont le Sénégal s’est inspiré – et la laïcité telle que conçue au Québec. Dans la Belle Province, le gouvernement entend appliquer les principes sur lesquels repose la laïcité de l’État en enlevant des droits à une minorité religieuse. Les identitaires soutenant la loi de la Coalition Avenir Québec semblent s’appuyer sur le combat historique entre le temporel et le religieux, dont la stigmatisation et la haine de l’Église est la résultante. La répugnance envers l’Église s’est transformée en une méfiance envers toutes les religions. Et la manifestation des croyances religieuses par quelques vêtements ou accessoires que ce soit semble provoquer un vent de contestations au Québec. Les préjugés envers les personnes de confession musulmane et le manque de pédagogie dans la gestion du dossier sur la laïcité n’ont fait qu’amplifier la discrimination basée sur les signes religieux. En suspendant la liberté de conscience et de culte, notamment par l’interdiction de signes religieux pour les employés de l’État, le gouvernement de François Legault fait une erreur d’application de la laïcité au Québec.

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