Mer. Mar 27th, 2024

Par Amandine de Chanteloup 

Le 19 septembre prochain, le Centre culturel de l’Université de Sherbrooke verra se tenir sur sa scène la pièce Bluff. Il s’agit de la première pièce de théâtre originale présentée simultanément dans trois salles connectées à travers le Québec: Gaspé, Rouyn-Noranda et Sherbrooke. 

Bluff est une pièce de théâtre de style nouveau qui se déroule dans trois villes distinctes, mais de façon simultanée. La pièce permet au public de réfléchir quant à la construction d’une identité virtuelle, mais aussi quant à l’influence des médias sociaux sur la nature des relations sociales. 

Véronique Pascal, comédienne qui interprètera son rôle depuis Sherbrooke, fait partie du processus de création depuis 2018. Elle raconte donc comment la pièce est née, d’abord sous forme de laboratoire à l’aide d’interactions d’exploration et d’improvisation avec les autres comédiens. Elle témoigne ensuite de l’expérience d’un tel style de théâtre.  

L’authenticité à travers les réseaux 

La pièce aborde l’enjeu de l’authenticité à travers les applications, les médias sociaux et la téléprésence. Le logiciel avec lequel les comédiens et les comédiennes travaillent permet de faire de la téléprésence de très haute qualité, ce qui donne d’ailleurs le caractère original de la pièce. En 2018, lorsque l’équipe esquissait une ébauche de la pièce, ce concept n’était pas encore aussi omniprésent : on ne parlait pas vraiment de Zoom, qui est devenu bien plus populaire avec la pandémie. 

La présence de plus en plus importante de ces dispositifs a donc amené l’équipe à y réfléchir. Que manque-t-on lorsque l’on utilise ces réseaux ? Quels sont les avantages, les désavantages, à communiquer à travers eux ?  

Ce sont donc sur ces cordes sensibles que la pièce vient jouer : « Si tu n’es pas physiquement devant moi, es-tu avec moi ? ».  

On se questionne sur la force d’une relation purement virtuelle en explorant diverses sphères de la thématique d’authenticité. Cette remise en question passe autant par les sujets abordés que par la mise à nu des acteurs qui se dévoilent au public.  

Un style accessible 

Même si la pièce utilise un dispositif complexe, le charme réside dans la simplicité du rendement et dans l’honnêteté des acteurs. Malgré le fait qu’il s’agisse de théâtre technologique, la pièce demeure tout de même très accessible : l’intimité qu’entretient l’acteur avec le spectateur est centrale. Authenticité, humour, questionnement philosophique se mêlent de façon que tous et toutes puissent avoir leur compte. Les réflexions à propos des thématiques sont en filigrane dans les mains du spectateur, qui peut ainsi se projeter et y réfléchir sans jamais être écrasé par la lourdeur de ces questions. Ainsi, Bluff est ouverte à quiconque se questionne sur l’impact de la présence des médias sur les relations. Cette problématique touche d’ailleurs de plus en plus de gens étant donné l’omniprésence des réseaux et des médias.  

Interpréter une telle pièce 

Les personnages interprétés par les acteurs sont des déclinaisons d’eux-mêmes. Chacun croit plus ou moins qu’il est possible de faire un spectacle en téléprésence aussi bien qu’en présence. 

En réalité, Véronique est assez en accord avec son personnage, qui doute quelque peu de cette possibilité. « Cette expérience-là me fait réfléchir sur les liens qu’on tisse quand on crée un spectacle avec le spectateur et avec nos collègues. Avec ces derniers particulièrement, c’est très différent de répéter avec des personnes qui sont à côté, et avec qui on entretient un lien, avec qui on partage. J’ai trouvé difficile de répéter en zoom. »  

Amoureuse du contact avec les gens, Véronique ne souhaite pas que sa carrière ne se résume qu’à ce genre de pièces, et ce, même si l’expérience est unique en son genre.  

L’interprétation, malgré la complexité technique, demeure très fluide sur scène. « Les gens ne soupçonnent pas à quel point c’est compliqué de faire interagir trois espaces, trois mises en scènes. » L’actrice apprécie toutefois cette complexité qui rajoute à la saveur de son métier. 

De plus, le lien avec le public dans ce genre d’expérience est grisant pour les acteurs. En effet, ils sentent que les spectateurs désirent de tout cœur que cela fonctionne. « Si je sens que le spectateur est avec moi, ça me donne des ailes. » 

C’est toute une expérience que l’acteur vit avec son public, et même si la technologie n’en est qu’à ses débuts, l’ambiance crée toute la magie du spectacle.  

Un vaste potentiel 

Véronique croit que ce genre de pièces va se multiplier à l’avenir. Pour le moment le travail d’acteur est au service d’une technologie en plein raffinement, ce qui rend la chose complexe. L’actrice pense toutefois que la technologie finira par se bonifier et que les pièces telles que Bluff constitueront le balbutiement d’un certain style naissant. En effet, il est plus que pertinent de bénéficier d’une telle technologie puisque cela permet de créer avec toutes sortes de personnes, peu importe où elles se situent à travers le monde. Ce genre de spectacle pourra donc aider tant les acteurs que les publics à rencontrer diverses cultures.  

L’actrice conclut en ajoutant que tous peuvent y trouver leur compte et qu’il est plus que pertinent de venir admirer la prouesse technique, l’effort, le côté authentique et expérientiel de la pièce. Il s’agit d’une véritable expérience à ne pas manquer ! 


Crédit image @Michel de Silva

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