Vingt-cinq ans après le référendum, que pouvons-nous retenir du projet d’indépendance ?

Par Simon RD

Depuis le 30 octobre dernier, vingt-cinq ans se sont déjà écoulés depuis le dernier référendum qui aurait pu placer le Québec dans la liste des peuples souverains du monde. La belle Province est passée à quelques minimes décimales, soit 50,58 % pour le non et 49,42 % pour le oui, de réaliser le rêve d’un Québec libre. Vingt-cinq ans plus tard, où en sommes-nous avec la question référendaire ?

Durant la soirée du 30 octobre 1995, la population du Québec et celle du Canada en entier (ou presque) étaient rivées devant leurs écrans, afin de connaître le résultat qui aurait pu changer la face du Québec à tout jamais. Le Québec allait-il devenir un pays ? Le mouvement indépendantiste souhaitait plus que jamais pouvoir ouvrir la bouteille de champagne après cette soirée historique.

La souveraineté québécoise, un débat polarisé

En regardant le documentaire Prise 2/Take Two, disponible sur le site de l’ONF, le constat est frappant de voir à quel point le Québec était indéniablement divisé sur les enjeux que représentaient un État francophone souverain. De surcroît, peut-être par incompréhension, beaucoup de citoyens issus d’un autre milieu culturel ne croyaient pas au projet, pire encore, voyaient cette séparation comme une menace et comme un nationalisme radical. Le Québec allait crouler, ce serait féroce et sans appel. Le jour du vote, on disait que beaucoup avaient fait leurs valises, prêt à « émigrer » vers l’ouest, l’autre côté de la frontière de l’Ontario.

L’idée de ne pas avoir été assez inclusif aura peut-être coûté cher au mouvement indépendantiste. Sans doute que la rhétorique raciale fut une manière malhabile de mener à terme l’indépendance et l’une des composantes polarisatrices d’un projet aussi énorme qu’eut été celui de la souveraineté québécoise. À travers le documentaire, on voit des individus issus d’autres origines, souvent anglophones, refuser le terme de peuple/nation distincte pour les Québécois.

En revanche, on voit des anglophones essayer de comprendre l’idée de ce projet, de débattre comme tout bon citoyen vivant dans un système démocratique et de libre pensée. Les fédéralistes et le gouvernement libéral de Jean Chrétien, par la courtisanerie et la propagande, aimaient faire la cour aux Québécois et aux néo-Québécois en évoquant : Un Québec fort dans un Canada uni. Le projet indépendantiste prônait plutôt un Québec fort établissant des relations commerciales fortes avec le Canada. Il faut noter que la propagande s’est exercée dans les deux camps (à la guerre comme à la guerre).

Premier référendum de 80

Au premier référendum de 1980, le gouvernement de René Lévesque et le camp du OUI avaient essuyé une première défaite. M. Lévesque avait alors calmé le jeu avec cette célèbre phrase : « Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de me dire : à la prochaine fois ». La suite des années 80 fut-elle façonnée par une désillusion, celle d’un rêve de souveraineté fichu et reporté ? On pourrait suggérer que le Québec se cherchait et que toute cette ambiance se ressentait aussi dans le cinéma québécois et même dans la musique. Comme l’œuvre musicale de Starmania qui, à travers ses pièces, présentait un Québec à la recherche de soi : « Les blues du business man ».

En 1994, à la victoire du Parti québécois, voilà qu’un nouveau leader refait vivre le rêve d’un Québec libre et d’une nation reconnue avec Jacques Parizeau. Des politiques et des tactiques vicieuses fédéralistes ravivèrent le désir nationaliste : l’échec de l’accord du lac Meech et le rejet du projet pancanadien de Charlottetown.

Le changement

À la suite du référendum de 95, les partis fédéralistes ont certes appris à faire plaisir aux Québécois, enfin à prendre des décisions très politiques. Le changement, probablement le plus significatif, sera la reconnaissance de la nation québécoise par le gouvernement d’Harper en 2006, sous la motion sur la nation québécoise. Encore là, un sondage effectué par la firme Léger montrait que les Canadiens étaient très divisés sur cette question. En effet, 48 % étaient en accord et 47 % étaient en désaccord…

En revanche, 78 % des francophones au Québec étaient en accord et seulement 38 % des anglophones au Québec le reconnaissent. La question québécoise et d’un peuple distinct semble effectivement être une question linguistique… De French Frog à Speak White, les Québécois devront toujours se battre pour préserver leur langue. Or, à la fin de la journée, la reconnaissance d’une nation ne devrait-elle pas passer par l’indépendance ?

Un projet qui aurait dû inclure les autochtones

Le projet d’indépendance avait été accepté par le Bloc Québécois, l’Action démocratique du Québec et, bien sûr, une bonne partie des Québécois. Mais avions-nous, encore une fois, oublié quelqu’un ? En effet, nous avions oublié d’inclure les Premières Nations dans le projet, elles qui se sont fortement opposées à ce projet de diviser des territoires sur leurs propres territoires. On peut suggérer que le peuple québécois, dénonciateur du colonialisme britannique, avait lui-même agi en Grand Boss blanc. Une grave erreur.

Pourtant, Jacques Parizeau aurait pu aborder, par exemple, la question de la Loi sur les Indiens, une loi fédérale, qui aurait pu rallier les Autochtones au projet pour un Québec libre, mais surtout pour les peuples libres du colonialisme et toutes ces lois servant un but d’assimilation. On apprend du passé et la nouvelle génération pourrait peut-être transformer ce projet en quelque chose de plus moderne.

Aujourd’hui, une nouvelle génération

Plus les années ont passé, plus les nouvelles générations ont établi un lien fort entre communautés multiculturelles et Québécois « de souche ». Les idéologies et les valeurs changent. Un nouveau mouvement souverainiste plus moderne pourrait devenir quelque chose comme un projet unique où nous y sommes tous inclus, dans le débat et sans rhétorique raciale et discriminatoire. Ne parlons plus de cette utilisation du mot multiculturel, un terme très stratégique pour les fédéralistes. Parlons d’un projet inclusif, vert et de liberté. D’ailleurs, en visionnant la capsule réalisée par RAD de Radio-Canada Ces jeunes qui rêvent d’un 3e référendum, on rencontre une nouvelle génération qui pourrait mener à terme cette question référendaire, avec des valeurs modernes.

Ce n’est pas en créant des inégalités raciales et en tassant les Nations que le Québec deviendra un pays, mais en incluant tous et toutes. Ce projet ne devrait pas polariser la population, mais bien au contraire, rallier tout le monde, un Québec fort dans une Amérique alliée. Toutefois, il reste la question linguistique, cette aversion que certaines personnes ont pour un français dominant reste un enjeu… Toutefois, tout porte à croire qu’avec un projet rassembleur, c’est toujours possible de rêver. Une chose à la fois, « la liberté n’est pas une marque de yogourt ».

 

Sources


Crédit Photo @ Simon RD

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