Après la COP21 de Paris, quel destin pour l’environnement?

Par Dorian Paterne Mouketou

La COP24, qui s’est tenue du 3 au 14 décembre dernier, se veut une occasion pour les États du monde entier de s’accorder sur les règles de mise en pratique des engagements pris lors de la COP21. L’Accord de Paris avait fixé comme limite l’année 2018 pour arriver à une entente. Politiquement et techniquement, quels en seront les principaux défis?

Pour répondre à cette question, Le Collectif a interviewé Mme Annie Chaloux, professeure adjointe à l’École de politique appliquée et spécialiste de la gouvernance climatique.

Les grands enjeux de la COP24 2018 en Pologne

La mécanique de la mise en œuvre de l’Accord de Paris doit se faire cette année afin que l’accord soit véritablement effectif à partir de 2020. Le premier défi est celui de l’atténuation, qui touche notamment la question de la réduction des gaz à effets de serre. En ce sens, les pays doivent mettre en place une mécanique afin de toujours renforcer leurs engagements tous les 5 ans. Ainsi, à long terme, on parviendra à respecter les objectifs fixés lors de la Conférence de Paris de 2015 sur les changements climatiques.

Le deuxième défi est celui de l’adaptation. Il faut mettre en place une structure et développer une mécanique de financement qui permettront d’aider les pays les plus vulnérables à s’adapter aux changements climatiques. En effet, selon Mme Chaloux, « on a beau faire des promesses à l’échelle internationale, mais il faut que ces promesses se traduisent en engagements réels ».

Enfin, le dernier volet est celui de la transparence dans la communication des informations. En effet, selon l’Accord de Paris, tous les pays doivent avoir une mécanique dans le calcul de la réduction de leurs empreintes écologiques. Ces calculs sont essentiels pour comparer « les bons et les mauvais élèves ». En même temps, la question de la souveraineté des États se pose : un pays comme la Chine accepterait-il des inspections internationales sur son industrie?

Le rapport onusien sur le réchauffement climatique

Cette année, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU a publié un rapport spécial sur les effets du réchauffement planétaire de 1,5 º C. Tel est le niveau auquel les impacts négatifs du changement climatique se situeront. Le rapport établit quelques conséquences des changements climatiques qui pourraient être évitées si le réchauffement était limité à 1, 5 º C, au lieu de 2 º C. « Ainsi, d’ici à 2100, le niveau de la mer à l’échelle de la planète serait, si le réchauffement était limité à 1,5 °C, inférieur de 10 cm à celui qui risquerait d’être enregistré s’il était limité à 2 °C », stipule le rapport.

Aussi, le rapport stipule qu’avec « un réchauffement de 1,5 °C, 70 à 90 % des récifs coralliens disparaîtraient, alors qu’avec un réchauffement de 2 °C, la quasi-totalité (> 99 %) serait anéantie ». Les pays sont sommés d’agir le plus rapidement possible dans les domaines de l’aménagement du territoire, de l’énergie, de l’industrie, du bâtiment, du transport et de l’urbanisme.

Si l’on veut éviter d’autres conséquences des changements climatiques « les émissions mondiales nettes de dioxyde de carbone (CO2) d’origine anthropique devraient être réduites d’environ 45 % par rapport aux niveaux de 2010 d’ici à 2030 ». De plus, les pays devront un « bilan nul » des émissions d’ici 2050, « ce qui signifie que les émissions restantes devraient être compensées en éliminant du CO2 de l’atmosphère ». 

Quel portrait au Canada?

« Le Canada est loin d’atteindre ses objectifs [de réduction de gaz à effets de serre] pour 2030. » En effet, la cible pour le Canada pour 2020 est de 17%. Pour 2030, elle est de 30%. Or, nous sommes loin de ces objectifs. En termes de financement, sur les 2,5 milliards qu’avait promis le Canada, seulement 625 millions ont été officiellement débloqués. Le gouvernement fédéral ne souhaite pas être le seul à financer ces réductions, voulant également compter sur les provinces, les entreprises et les villes canadiennes.

Le Québec s’est doté d’une mécanique pour réduire ces gaz à effets de serre à travers notamment du marché de carbone. « C’est normal pour une province d’atteindre ses objectifs parce que la plupart des compétences qui permettent de réduire les gaz à effets de serre se retrouvent à l’échelle des provinces. Donc le Québec, c’est un bon élève. Mais il y a plein d’autres provinces qui ne font pas leur travail », dit Mme Chaloux.

C’est ce qui explique que le Canada a des difficultés. L’incapacité du fédéral à réduire ses gaz à effets de serre ne résultent pas forcément d’un manque de volonté, mais plutôt d’un manque de collaboration de certaines provinces. En effet, le gouvernement fédéral avait mis en place un plan pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, notamment une mesure de tarification carbone. Toutefois, l’adhésion des provinces demeure problématique. Le Saskatchewan n’avait pas signé ce plan. L’Alberta avait menacé de sortir du plan et de poursuivre le fédéral, jugeant que ce dernier empiète sur ses compétences. L’Ontario, le Nouveau-Brunswick et le Manitoba vont suivre également.

Et après la COP24?

Il n’y aura pas de nouvel accord à signer. La COP24 s’inscrit dans la continuité des autres conférences sur le climat. « On doit répondre à tous les objectifs et toutes les promesses de cet engagement-là, et les rendre intelligibles et concrets pour que les pays puissent savoir quoi faire pour respecter leur engagement envers l’Accord de Paris », souligne Mme Chaloux. De ce fait, non seulement les pays doivent continuer à contribuer à réduire les gaz à effets de serre, ils doivent également contribuer financièrement pour l’adaptation. Les pays doivent en ce sens accentuer la coopération.

La nouvelle conférence sur les changements climatiques se déroulant en Pologne a pris fin ce vendredi dernier. Les pays se sont résolus à voter un accord ambitieux pour l’application de l’Accord de Paris.


Crédit Photo @ Euractiv

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